With the restoration of the Bourbon monarchy in 1814, some elements of the political elite in France considered reconquering Haiti and restoring slavery there. Drouin de Bercy’s De Saint-Domingue (1814) is an argument in favour of this project.
The main section of this book of interest to scholars of vaudou is the final three-page Note, which is reproduced in full below. But to help contextualize it, this is preceded with some extracts, including the section of the main body of the text which refers to vaudou (and refers the reader to the final Note for more details).
The full text of the note is reproduced in Pierre Pluchon, Vaudou sorciers empoisonneurs: De Saint-Domingue à Haïti (Paris: Éditions Karthala, 1987), pp110-13. However, Pluchon ignores some of the paragraph breaks, and modernizes some spelling and punctuation.
from De Saint-Domingue
The Résumé Général that concludes this short book (pp129-74) consists of a list of numbered points, prefaced by the following remark:
Pour ramener St.-Domingue à son premier état de splendeur, et lui donner une consistance que cette île n’avait pas avant la révolution, je crois qu’il conviendrait.
1. De faire de S.-Domingue le chef-lieu général des Antilles, d’y établir des chantiers de construction, des voileries, des corderies, des arsénaux […. etc] (p129).
And it may be worth quoting the 25th point in full (pp168-72), as it is here that the reference to vaudou is found:
25. Toutes les fois qu’il a été question du châtiment que la métropole devait infliger aux rebelles de Saint-Domingue, les opinions se sont partagées en raison du ressentiment, de l’intérêt et de la cupidité des individus. Ceux qui avaient à pleurer la mort d’un parent, d’une épouse ou d’une maîtresse chérie désiraient venger leur mort sur tout ce qui était homme; ceux qui avaient reçu des [169] services de ces mêmes individus, ou qui avaient des propriétés, proposaient de faire un choix pour le nombre des victimes; et ceux enfin qui spéculaient sur le trafic de ces misérables, soutenaient que la colonie ne serait jamais tranquille, si on ne les détruisait pas tous jusqu’au dernier.
Les crimes atroces et réfléchis de ces monstres inhumains nécessitent certainement un exemple, pour ôter désormais à leurs confrères d’Afrique l’envie de se porter à des excès aussi révoltans, que ni la servitude ni les mauvais traitemens qu’ils peuvent avoir éprouvés dans certains cas, ne sauraient justifier. Comme ils considèrent maintenant cette colonie comme une propriété que le sort de la guerre a mis en leur pouvoir, le Gouvernement ne saurait prendre trop de précautions pour s’en emparer et pour s’y maintenir, parce qu’il ne peut plus désormais se fier à leurs promesses ni à leur soumission.
Tous les chefs, jusqu’au grade de caporel, doivent disparaître de St.-Domingue.
Ceux des rebelles armés qui se soumettront sans coup férir à l’arrivée ou au passage de l’armée française, et qui aideront à réduire les autres, doivent avoir la vie sauve et être considérés en outre comme troupé disponible aux ordres du Gouvernement, qui les emploiera comme bon lui semblera, et même hors de la colonie s’il le juge nécessaire; cela doit se faire avec beaucoup de pré- [170] caution, pour ne pas les effaroucher, et pour écarter de leur esprit jusqu’à l’idée de la noyade. Les révoltés qui seront pris les armes à la main seront fusillés si l’on ne peut pas les échanger contre les prisonniers ou les blancs qu’ils auront en leur pouvoir.
Ceux qui, après une résistance quelconque, seront forcés de mettre bas les armes et de se rendre, seront embarqués pour la France, soit pour y organiser des corps, soit pour les employer aux travaux que le Gouvernement jugera convenables; les cultivateurs les plus délurés, connus sous le nom de Docteur, Candio, Caprelata, don Pedro et Vaudoux, doivent être compris dans cette mesure. [Footnote: Voyez la Note à la fin de l’ouvrage.]
Toutes les négresses des villes et des campagnes qui étaient ménagères, revendeuses, et accoutumées à se faire servir par leurs semblables, n’étant plus propres à la culture et ne pouvant sans danger rester parmi les cultivateurs, ainsi que les vieillards des deux sexes, depuis cinquante ans, qui sont à craindre par leurs conseils et par les poisons qu’ils donnent aux jeunes nègres, doivent être à la disposition du Gouvernement pour les envoyer où bon lui semblera.
Les enfans des deux sexes, depuis l’âge de sept ans, doivent être considérés comme innocens des [171] crimes de leurs pères, et conséquemment avoir droit à la protection du Gouvernement. Parmi les cultivateurs des deux sexes, le Gouvernement fera fort bien d’en prendre un certain nombre pour les employer à dessécher les marais, à curer les ports, à réparer les grandes routes, à travailler aux mines de cuivre, de fer, et dans les arsenaux de l’État.
La caste mulâtre, comme étant la plus dangereuse, la plus remuante, la cause et l’âme de toute les insurrections des nègres, demande à être traitée, s’il se peut, avec plus de sévérité que les noirs; c’est à la sagesse du Gouvernement à décider sur la mesure générale qu’il doit prendre en cette occasion.
Quand l’île sera totalement conquise et purgée de tout ce qui pourrait troubler à l’avenir sa tranquillité intérieure, le gouvernement [sic, lower case], un an après la conquête et l’organisation de ce pays, pourra envoyer pour son compte dix vieilles frégates armées en flûte, faire la traite en Afrique aussi longtems qu’il jugera à propos d’introduire des noirs à Saint-Domingue, pour les vendre aux habitans ruinés. Le montant de cette vente sera hypothéqué sur la propriété, et le recouvrement du paiement s’en fera annuellement sur la récolte, jusqu’à parfait paiement, l’intérêt compris.
Par ce moyen le Gouvernement remontera sa colonie en peu d’années, et il acquerra un nouveau [172] droit à la reconnaissance des habitans; puisqu’il pourra leur donner les noirs à meilleur marché que les spéculateurs commerciaux.
The Note to which we are directed in the footnote above is appended to the main body of the volume,beginning on a separate page, after the conclusion of the numbered list, which ends with:
36e. Que la justice y soit gratis, simple et prompte (p174).
Note
Le nègre Candio ou Docteur est ainsi appelé, parce qu’il s’habille avec plus de soin que les autres; il est entreprenant, libertin, et se fait entretenir par les négresses; c’est un feseur d’embarras, qui, par ses motions, par son bavardage et par sa conduite indiscrète, occasionne souvent du trouble sur les habitations, ou dans les danses de nègres, appelées Calinda.
Le Caprelata est un mauvais sujet qui court d’habitations en habitations, et ne travaille jamais; il contrefait le sorcier, et vend aux Noirs des amulettes et des fétiches, avec lesquelles il leur assure qu’ils peuvent tout faire et qu’ils seront à l’abri de la détection, des châtiments, et même des coups de fusil; il porte sur lui et sur sa tête, une vingtaine de petites queues garnies de plume et de pattes d’oiseaux, des rasades, des graines et des conquillages.
Le Don Pédro est un nègre qui court les habitations pendant la nuit, pour voir ses femmes. Il ne se contente pas de voler les vivres, les volailles et les moutons, il dépayse encore les chevaux et quelquefois les petits négrillons; il est paresseux, raisonneur et menteur effronté. Il a une couple de queues sur la tête, et une cadenette de chaque côté de la figure; il porte ordinairement un gros baton, ou un gro fouet, appelé Arceau. [176] Les postillons, les charretiers et les gardeurs d’animaux, sont en général des Don Pédro.
Le Vaudou est le plus dangereux de tous les nègres; il ne travaille que lorsqu’il ne peut pas faire autrement; il est voleur, menteur et hypocrite; il donne de mauvais conseils aux Noirs, et leur distribue des poisons subtils avec lesquels ils détruisent imperceptiblement les bestiaux, les volailles, les blancs et le nègres qui leur déplaisent. Les gardiens de barrière, de jardin, de vivres, de pièces de cannes, et un grand nombre de vieux nègres sont des Vaudoux; ils ont toujours dans leurs cases différens poisons contenus dans des Cocos, ou des Calebasses.
Le Don Pédro et la Vaudou sont une association d’autant plus terrible qu’elle a pour but la ruine et la destruction des blancs, et de persuader aux nègres qu’ils ne seront jamais heureux, s’ils n’y sont pas associés. Pour être Don Pédro, il faut être bon filou, effronté, entêté, endurci aux coups, et ne jamais révéler de ce qui s’est passé dans leurs rendez-vous.
Quand la confrairie croit n’avoir rien à craindre de la faiblesse, de la lâcheté, ni de l’indiscretion d’un nègre qui désire devenir Vaudou, elle en instruit le roi de cet ordre. Le récipiendaire subit alors un mois d’épreuves. S’il prouve par son adresse à voler, par sa patience, par sa fermeté, et par sa résignation à souffrir les coups, que rien ne peut lui arracher son secret, on l’introduit les yeux bandés dans la salle décisive. Aussitôt qu’il est à genoux, on lui ôte son bandeau; il voit tout autour de lui des nègres armés et chamarés d’une manière effrayante, et dans le milieu de la chambre, un grande nappe parsemée de taches de sang, de plumes et de griffes d’oiseaux. [177]
Un bruit affreux annonce l’apparition du roi Vaudou, qui sort de dessous la nappe, tenant un rison ardent d’une main et un poignard de l’autre; il demande d’un air féroce au récipiendaire ce qu’il veut. «Je désire, dit-il, baiser la couleuvre sacré, et recevoir de la Reine Vaudou ses ordres et ses poisons.» Le Roi, pour l’éprouver, lui enfonce la pointe de son poignard dans le bras, et sur le gras de la cuisse, ensuite il y applique son tison ardent. Si le nègre se plaint ou fait la grimace, il est assassiné sur-le-champs; s’il ne fronce pas du sourcil, les noirs armés le conduisent alors dans une chambre vaste au bout de laquelle il y a un rideau, et au milieu de la salle un grand Bamboula, our tambour, de quatre pieds de haut, orné rubans, de feuillages et de fétiches.
Le récipiendaire la traverse sur ses genoux et sur ses coudes, entre deux rangs de nègres et de négresses. En arrivant auprès du rideau, il fait offre des volailles et des vivres qu’il a volés, le rideau se lève immédiatement, il aperçoit sur un trône le Roi Vaudou près à le percer d’une flèche, et à côtè de lui, la Reine qui retient l’arme meurtrière. Sitôt que son offrande est faite, on lui passe la couleuvre tout autour du corps, il la baise, et reçoit ensuite les ordres et les poisons de la Reine, pour détruire dans deux or trous mois ses ennemis et leurs animaux.
Sept nègres nuds, ayant des feuilles autour des reins, des plumes sur la tête et des rasades autour des poignets, le prennent et le conduisent auprès du tambour sacré; ils l’arment d’un bâton semblable au leur, lui font boire un breuvage enivrant, mêlé de sang, de poudre à canon et de tafia, après quoi ils chantent et répètent en choeur les paroles suivantes, qu’ils commencent et terminent par un coup de bâton sur la Bamboula. [178] «A ia bombaia bombé, lamma samana quana, é van vanta, vana docki», qui signifient, nous jurons de détruire les blancs et tout ce qu’ils possèdent, mourrons plutôt que d’y renoncer. Après le serment, les hommes et les femmes se mettent à danser tout nus, et à boire du tafia. La salle n’offre plus ensuite qu’une orgie indécente, dans laquelle les deux sexes se trouvent enlacés dans les bras les uns des autres.